19 avril 2024 | 20:13
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Cuisine municipale ou cuisine intercommunale : « Small is beautiful » !

En lisant les écrits des uns et des autres sur le projet de Grande Cuisine Centrale à Fontenay-aux-Roses, un slogan me revient en mémoire : « Small is beautiful. »

Est-ce l’effet du prénom, je ne résiste pas à l’envie de faire preuve d’un peu de pédanterie sur l’origine de cette affirmation.

Small Is Beautiful – une société à la mesure de l’homme est un recueil de textes de l’économiste britannique Ernst Friedrich Schumacher édité en français par Contretemps/Le Seuil.

Sa première publication en 1973 a mis les critiques de l’économie occidentale par Schumacher à la portée du grand public pendant le premier choc pétrolier et la reprise de la mondialisation.

Les principaux thèmes abordés sont :

  • L’importance de l’échelle humaine ;
  • L’idée de capital naturel, de traiter la nature comme un capital et non comme un revenu ;
  • L’introduction du souci des travailleurs et de l’intégrité environnementale dans les décisions commerciales ;
  • L’économie de la permanence, basée sur l’utilisation soutenable des ressources naturelles ;
  • Le décentralisme et la foi dans l’autosuffisance communautaire.

(Sources : Wikipedia)

Quelle vision ! L’auteur abordait dans cet ouvrage des sujets qui sont au centre des réflexions politiques actuelles : c’était il y a près de 50 ans, à la fin des 30 glorieuses (les 30 années qui ont suivi la fin de la 2nde guerre mondiale) et à un moment où personne n’imaginait quelles seraient les conséquences de plusieurs chocs pétroliers, donc énergétiques, successifs…

Ces questions sont également au cœur de l’avenir de la cuisine municipale de Fontenay-aux-Roses.

  • Personne ne nie qu’après près de 15 ans de fonctionnement, il y a certainement des rénovations techniques à prévoir ;
  • Personne ne nie qu’il y a certainement des progrès à réaliser pour confectionner des repas avec plus de produits frais, plus de produits bio, plus de produits issus de circuits courts, moins de protéines animales (menus végétariens), etc. ;
  • Personne ne nie que les conditions de travail du personnel de la cuisine centrale peuvent sans doute être améliorées…

Mais faut-il pour cela changer d’échelle en construisant une nouvelle cantine qui produira 5, 6 ou 7 fois plus de repas ?

  • En dilapidant les ressources naturelles : reconstruire un nouvel équipement plutôt que rénover un existant de moins de 15 ans coûte plus cher et a plus d’impact sur l’environnement. Où est le souci de l’intégrité environnementale ?
  • En ne facilitant pas les approvisionnements : acheter des produits bio, frais et en circuits courts pour 2 500 repas n’est déjà pas si simple ; pour plus de 10 000 repas, ce sera la quadrature du cercle ! Il faut s’attendre à du bio industriel et congelé… Avec en plus l’impact environnemental du transport. Où sont l’économie de la permanence et l’utilisation soutenable des ressources ?
  • En diluant les responsabilités : aucune des 4 communes concernées n’aura la majorité dans la Société Publique Locale qui gèrera l’équipement et en confiera presque inéluctablement l’exploitation à un des grands industriels de la restauration collective. Où est l’organisation à échelle humaine ?
  • En dégradant les conditions de travail du personnel : d’évidence, la dilution des responsabilités et l’appel à des opérateurs privés ne déboucheront pas sur une amélioration des conditions de travail du personnel. Où est le souci des travailleurs ?

Ce qu’on nous propose, c’est l’exact opposé de Small is beautiful, c’est Larger is better (ou Plus c’est grand, mieux c’est), un slogan très inspiré de l’économie libérale qui, appliqué aux collectivités locales, n’a jamais fonctionné : qui a vu ses impôts locaux diminués ou la qualité de service augmentée par la création de structures intercommunales ?

La Société Publique Locale (SPL) créée pour porter ce projet de grande cuisine centrale a été baptisée « La cuisine près de chez vous ». Géographiquement ce ne serait pas plus vrai demain qu’aujourd’hui pour les fontenaisiens. Peut-être pour les autres communes…

Personnellement, j’aurais préféré qu’on appelle le projet « La cuisine plus près de vos préoccupations ». Mais cela ne semble pas être l’objectif…

Michel Giraud

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